Ce bistrot ne pouvait pas mieux s’appeler. Les patrons ont en effet un “Sens Unique” pour recevoir et faire partager leur passion du Périgord et leur idée de la gastronomie. Sophie et Bruno, aux commandes depuis 2009, en ont fait un rendez-vous pour les fines gueules qui aiment les escapades dans les beaux terroirs. A condition que le guide soit à la hauteur.
C’est Rudy qui vous accueille au Sens Unique. Un beau sanglier de 120 kg abattu par des amis des patrons à quelque km de Sarlat. Il y a aussi le coq de fonte sur le comptoir au-dessus duquel pendent des saucissons. Ça pose l’ambiance. Idem pour les tonneaux et autres plaques des concours de races bovines. Ou la cloche sous laquelle reposent Saint-Nectaire, tomme de Savoie et autres camemberts au lait cru. Le côté champêtre est évident ne serait que ce branchage de pommier en fleur qui court au dessus du comptoir et qui aurait fait pleurer Maupassant…
Mais voilà, une enfance en Dordogne, ça vous marque toute la vie. Bruno a ramené le moulin à poivre de la grand-mère qu’il a fixé au comptoir et qui sert pour assaisonner ses Sarladaises. Pas question pour lui de trahir ses racines en faisant des compromis sur la qualité. Ainsi en va-t-il des truffes qu’il a appris à déterrer à l’âge de six ans avec son grand-père. Les siennes viennent de la truffière de la maman. Il les laisse quelques jours au contact de ses œufs pour que l’omelette soit encore plus aromatique.
Ce patron a la religion du produit…périgourdin bien sûr mais pas seulement. Il en va ainsi du pastis du Périgord et surtout des spécialités à base d’oie qui sont concoctées par son cousin du pays, Didier Clerjoux (ci-contre). Rillettes et autre cou d’oie farci et surtout une galantine à base de foie gras qui vous explose au palais. Il en va aussi de même des cochonnailles du charcutier aveyronnais Pierre Boscus établi près de Conques. Le patron prend bien soin de sortir chaque matin le saucisson afin de le mettre à température ambiante pour la trancheuse qui n’est pas là pour la figuration. Pour le pain, Bruno l’aime chantant, et il réclame à sa boulangère une double cuisson pour le craquant. Il aime aussi le relief et la texture comme celle des rognons massifs cuits rosé par le chef Eric, formé chez les meilleurs gastros.
La viande de premier choix vient d’une boucherie suivie par Hugo Desnoyers. Et elle est diabolique comme l’entrecôte de Salers de 300 g servie avec des pommes sarladaises ( 27,50€) ou le pavé d’Aubrac (26,50€) , sans oublier les grands jours, la côte de bœuf maturée cinq semaines. L’été l’agneau de pré-salé du Mont-Saint-Michel reste à la carte un bout de temps.
Pas étonnant, c’est le chef du midi, le bien nommé Eric Lethimonnier originaire du Cotentin qui le commande à son ami Gérard Legruel. Lequel produit également tout une série de légumes oubliés (panais et rutabaga éliantis) qui égayent les assiettes. Imaginez le goût de la souris d’agneau cuite à basse température ( 90°) une bonne partie de la nuit. Bref, ce chef sait aussi travailler les beaux poissons.Il faut voir Bruno portionner ses tranches d’un saumon magnifique.
Il y en a toujours un en plat du jour…Le soir, c’est Joachim Van Ginneken, un jeune chef alsacien, qui prend en main des fourneaux. Lui aussi fait preuve d’un talent mâtiné de chauvinisme. Par exemple quand il déglace ses sauces au fameux vinaigre alsacien de Melfor. Une arme secrète des chefs alsaciens…utilisée dans un bistrot périgourdin. Encore une expression de ce sens unique de la gastronomie française de ce bistrot de terroir pas banal.
Pour les vins, cap au sud.
Est-ce un effet de la vieille rivalité entre Bordelais et Périgourdins ? A l’exception de deux médocs et d’un blayais, le patron du Sens Unique marque sa préférence sur ses ardoises pour les vins du sud. Exemple avec ce patrimonio blanc du Domaine Leccia ou ce bandol Château Sainte-Anne, 2008. En vallée du rhône, il y a une côte rôtie signée Laurus ou un saint-joseph de Guigal, 2007 (49€). Sans oublier un enjôleur côtes-du-rhône vieilles vignes de Romain Duvernay entre garrigue et épices ou quelques bouteilles signées Drouhin à commencer par un joli saint-véran.
Qu’on se rassure il y a aussi des petits blancs qui mettent l’âme en joie au comptoir comme le quincy de Jacques Siret. Et à côté des belles étiquettes, il y a aussi d’autres bonnes surprises comme ce Rosé de Juliette du Mas Fabregous, un joli Terrasses du Larzac.
Le Sens Unique – 47, rue de Ponthieu – 75008 Paris – Tel. 01 43 59 76 77
Métro : Franklin Roosevelt
Du lundi au vendredi – Service continu de midi à minuit
Entrées de 9 à 16 € – Plats du jour de 21 à 25 €
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